En marge du travail sur le tourisme de Cap à Gauche autour des questionnaires de données statistiques en direction des commerçants, nous avons souhaité aller à la rencontre de quelques uns d'entre eux afin de recueillir leurs impressions de vive voix.
En général, ils ne se sont pas appesantis sur leur propre chiffre d'affaires ni sur l'évolution de celui-ci, en revanche ils portent un regard interrogateur sur l'évolution du village. Martine, commerçante depuis 24 ans dans le centre historique est assez dépitée : « Je pense que le village devient un désert, on ne voit plus personne dans les rues comme avant ». Gérard est un peu moins sévère : « C'est vrai qu'en 23 ans d'activité , j'ai vu les choses changées peu à peu. Nous ne sommes pas encore un village dortoir même si nous en prenons le chemin ». Bernard se targue de 55 ans de présence commerciale à Portiragnes Village, il porte une regard bienveillant sur les élus, il faut dire qu'il a été lui même conseiller municipal : « J'ai remarqué une évolution certaine à Portiragnes Plage, les touristes sont plus regardants sur leurs achats, le ticket moyen et de 10 euros, soit le quart des années 90 et 2000, mais en même temps ils restent de plus en plus en nombreux l'hiver. Maintenant il y a 550 personnes à l'année ».
Quant à la crise, aucun d'entre eux n'en ignore les effets : « On peut même dire qu'elle est européenne » , font en substance le constat Martine et Bernard. Ils ont dû chacun s'y adapter : « Moi j'ai la chance d'avoir des clients fidèles à l'année, faut dire aussi que cela s'entretient (rires) », explique Martine. Pour sa part, Gérard précise : « Les touristes font environ 90 % de mon chiffre d'affaires. J'ai constaté que vu les prix que je pratique, j'ai perdu une petite clientèle, celle de l'achat d'impulsion. En revanche, ma clientèle restante achète en plus grande quantité car je ne transige pas sur la qualité». Bernard a une recette éprouvée : « Je fais des efforts pour renouveler sans cesse mes vitrines et ce que je propose à ma clientèle d'été comme d'hiver ».
Ils sont unanimes pour déplorer l'absence d'une grande association de commerçants
« Je ne comprends pourquoi la municipalité ne prend pas l’initiative de rencontrer l'ensemble des commerçants portiragnais » se plaint Gérard. Martine déclare carrément « J'ai l'impression que la municipalité, depuis plusieurs mandats, n'aime pas vraiment ses commerçants ».Bernard lui y voit un problème de déficience de communication envers les commerçants : « C'est vrai que l'on nous écoute pas toujours... ». Gérard, lui s'insurge : « C'est bien simple, ils ne sont jamais venus me voir en 23 ans de présence, seul Expo[sito] (ancien maire) venait me dire de temps en temps un bonjour. Je ne connais pas l'élu en charge de communiquer avec les commerçants et personne à la mairie n'est capable de me donner un nom ! »
Le manque d'animations est particulièrement pointé du doigt, là encore la responsabilité de la communication dans les deux sens est mise en cause. Bernard est catégorique : « Il faudrait trois ou quatre événements culturels importants par an, avec une communication à la hauteur. Le reste des animations c'est aux commerçants eux même de les organiser. Il ne s'agit pas de faire son business à la plage deux mois dans l'année et puis prendre six mois de congé. Commerçant c'est un métier ! » Gérard souhaite que l'on communique plus sur des animations de type Canalissimo en « (…) faisant déborder les animations sur le village ». Martine souhaite également un renouvellement des événements festifs qui feraient participer un peu plus le village :« C'est pareil, la mairie a organisé un carnaval mais qui a été au courant ? Comment les villageois et les commerçants y ont été associés en amont ? Encore un défaut de communication évident avec un résultat de fréquentation pas vraiment au niveau ! »
En dehors de la communication, comment améliorer le vivre ensemble ?
Le constat de ces entretiens est assez réjouissant. C'est un fait, les commerçants fourmillent d'idées pour leur village. La majorité municipale aurait tout intérêt à leur prêter une oreille plus attentive. Bernard propose : « Moi, je suis pour que lors d'une réunion de commerçants on décide d'allonger peu à peu la saison sur Portiragne plage. Trop de commerces et de restaurants sont fermés l'hiver. Or les touristes sont déjà là à Pâques et sont encore présents en octobre. Moi je suis ouvert à l'année et je fais ma centaine clients par jour en basse saison... ». Gérard, pour sa part, souhaite que la mairie mette en place des arrêts minute : « Aujourd'hui nous sommes dans une « société bagnole », aucun commerce ne peut vraiment fonctionner en dehors d'un stationnement possible », Martine est pour l'amélioration : «(…) En lien avec les commerçants, du fléchage en ville. Il faut redynamiser le village qui s'endort peu à peu et cela rejaillit sur les clients. Il y a une certaine morosité ambiante... » Gérard insiste enfin pour la création « (…) D'un vrai marché paysan avec des produits du terroirs, des produits locaux en priorité ! Il faut privilégier les circuits courts, c'est l'avenir y compris vis à vis des touristes ! »
Ce qui se dégage finalement de ces échanges à bâtons rompus avec quelques commerçants, c'est la déficience de communication de la Municipalité. A Cap à Gauche nous avions dénoncé à plusieurs reprises cette communication à minima et pas seulement avec les commerçants. L'opacité volontaire du fonctionnement municipal rend illisible ses initiatives, notamment ses rares, trop rares animations comme l'ont fait remarqué nos interlocuteurs. Et c'est bien dommage pour les Portiragnais, commerçants ou pas, qui en subissent les conséquences.