Centre administratif Midi LibreOn ne dit plus pauvres, on dit Rmistes. On ne dit plus chômeur, on dit demandeur d’emploi. On ne dit plus usagers, on dit bénéficiaires et clients, on ne dit plus employés, on dit collaborateurs, on ne dit plus petits boulots, on dit jobs…
On pourrait continuer comme cela longtemps la liste de mots appartenant à la langue de bois que nous finissons par utiliser quotidiennement à force de les entendre partout autour de nous.
Cette langue de bois, ou novlangue, se fabrique et est relayée à l’intérieur de notre société, par les publicitaires, les médias, les politiques, les intellectuels et par une catégorie plus discrète les laboratoires d’idées, les fameux « Thinks tanks ».
Cette langue de bois fonctionne sur la répétition qui finit par faire perdre le sens et l’utilité des mots plus clairs et plus simples. Elle utilise différentes techniques et figures de styles dont chacune a un intérêt/objectif particulier. Par exemple les euphémismes comme « les pauvres devenus des publics défavorisés puis fragilisés » sont très utilisés et servent souvent à adoucir, à renommer une réalité dure en retirant sa charge négative.


Avec les oxymores, il s'agit de coller deux termes antinomiques comme dans flexi-sécurité ou capitalisme moral. L’intérêt est de brouiller les cartes et d'empêcher une analyse ou une remise en cause de ces concepts, qui paraissent aller dans le bon sens. Il existe bien d’autres figures de style à travers lesquelles la langue de bois se déploie comme les anglicismes, les sigles, ou encore l’hyperbole très utilisée quand on veut durcir une réalité, la rendre négative.
Par exemple l'emploi de l'expression « charge sociale » en lieu et place de « cotisation sociale » se généralise faisant disparaitre le mot cotisation et avec lui le sens dont il était porteur. Une charge c'est lourd donc pénible. L'alléger est perçu alors comme une chose positive. C’est un soulagement. Alors qu’en réalité, les cotisations sociales ne constituent pas des prélèvements ou une taxe sur le travail. Elles sont un élément du salaire (salaire socialisé ou mutualisé). Pour les salariés, elles ne constituent donc ni un prélèvement, ni une charge mais un supplément.
On comprend bien quel est l’objectif de cette langue de bois. Si le langage structure notre pensée et notre façon de percevoir le monde, alors cette langue de bois n'est pas du tout neutre mais poursuit des objectifs bien précis qui participent à une finalité que l’on pourrait résumer ainsi : naturaliser le libéralisme et engendrer un certain fatalisme.
A Portiragnes, nous sommes aussi atteints par cet excès de modernisme toujours associée au réformisme qui masque le sens réel des transformations économiques et sociales entreprises par le libéralisme.
En effet, il s’écrit et se dit que le bâtiment en construction sur l’emplacement du city-stade n’est ni un hôpital comme certains l’ont avancé, ni la nouvelle sous-préfecture de l’Hérault comme on l’a entendu dire, ni une mairie, comme on le pensait, mais un centre administratif. Qu’est-ce à dire ? Est-ce que les mots « « mairie » ou « hôtel de ville » seraient devenus trop désuets, pas assez branchés, pas assez chics. Cette terminologie, un peu pompeuse est déconcertante et préoccupante. Elle crée de l’incertitude quant au devenir de la commune dont la Mairie est le bâtiment symbolique. Les mots ont un sens et ce changement de nom nous annonce quoi ? La fusion prochaine avec une ville voisine ? La mort des communes au profit des collectivités intercommunales ? Si c’est le cas, alors ce centre administratif est un bâtiment surdimensionné pour les seules fonctions qui lui resteront : délivrer et recevoir des documents administratifs. Si ce n’est pas le cas, alors appelons ce bâtiment pour ce qu’il est et ce que nous voulons qu’il reste : une Mairie avec un M majuscule.

 

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