Troisième partie : QUAND ON RESTE LE BEC DANS L'EAU OU VERS LA FIN DES HARICOTS
Bilan de l’action des élus de Mieux Vivre à Portiragnes et autres réflexions (personnelles)
A) En tout premier lieu, malgré le caractère difficile de notre mission, nous avons essayé avec nos faibles moyens de rendre compte de nos positions. Pour ce faire, il a fallu toujours partir à la recherche des informations afin de comprendre les tenants et les aboutissants des délibérations et des dossiers afférents. Les deux élus n’ont pas toujours suffi à cette tâche qui selon les dossiers pouvaient se révéler colossale.
Ce qui est certain, c’est que notre action comme notre influence sur les dossiers a été plus que réduite mais peut-être pas inexistante parce que nous avons en permanence été des « empêcheurs de tourner en rond » en interrogant le bien-fondé des décisions que l’on nous présentait.
Ainsi, si notre impact n’a pas été toujours été très visible, notre présence active a toujours représenté un contre-pouvoir à la majorité à l’intérieur du conseil comme à l’extérieur, par l’intermédiaire du journal la Lettre où beaucoup d’articles ont été consacrés aux affaires municipales et aux dossiers dont nous souhaitions informer les Portiragnais en raison de l’importance de leurs enjeux et parce que nous savions que la majorité ne communiquerait pas dessus ou longtemps après ; pour exemple la ZAC, les travaux du cœur de ville, le doublement de l’approvisionnement en eau…
Ainsi, jusqu’en 2018 avec la Lettre et après, via le site de Mieux Vivre à Portiragnes, nous avons toujours cherché à informer les Portiragnais de ce qui se passait dans la commune. Pour autant, notre influence sur la vie politique portiragnaise est difficile à mesurer car nous n’avons que quelques indicateurs sur celle-ci. : les retours de personnes rencontrées, l’attitude des élus de la majorité à notre égard. Ce qui est quand même peu. Si beaucoup de personnes lisaient régulièrement et attentivement La Lettre, il ne s’est pas créé autour d’elle d’interactions suffisantes avec les Portiragnais, bien que très souvent, on nous demandait la date de publication de la prochaine et les sujets que nous y aborderions.
Si nous avons eu quelques coups de chapeau et des louanges, nous avons aussi reçu le reproche assez récurrent de beaucoup critiquer et de ne pas faire suffisamment de propositions. Cette critique que nous admettons et comprenons fort bien ne nous apparaît pas toujours juste.
D’abord car toute critique se fonde sur un point de vue différent, sinon il n’y aurait pas critique.
Pour critiquer, il faut observer quelque chose qui ne convient pas, qui n’est pas comme nous voudrions que les choses se fassent. Par nature, il y a donc adossé à toute critique une contre-proposition.
Pour illustrer notre propos, prenons par exemple l’avenant de la ZAC, signé par la municipalité avec GGL. Nous critiquons le fait que GGL semble y être gagnant aux détriments des Portiragnais et que l’argent investi par GGL en compensation aurait pu ou dû être utilisé autrement au moins en partie.
Autre exemple, nous relevons toujours dans la ZAC que les nouveaux logements ne seront pas équipés d’un double approvisionnement en eau potable et brute, alors que c’est possible. Ces deux critiques s’appuient sur une vision différente de celle de la majorité et portent en elles des contrepropositions. Peut-être qu’on attendait de nous que nous précisions et détaillions nos contrepropositions, ce qu’effectivement nous avons un peu chuinté parce que les dossiers contradictoires étaient très nombreux et qu’il aurait fallu davantage de temps et de moyens pour être en capacité de le faire et enfin que le moment n'était pas arrivé de concrétiser ces propositions dans un projet.
Toujours est-il que ces points de désaccord, dans le cadre normal de la démocratie, aurait dû aboutir à un débat où chacune des parties aurait présenté ses arguments. Bref, en critiquant, nous ne faisions que pointer du doigt des dossiers méritant débat parce qu’il existait des alternatives.
Le hic c’est que ces débats n’ont jamais été possibles au sein du conseil et plus particulièrement au sein des commissions municipales puisqu’elles n’existaient plus.
D’autre part, si une partie de notre message a manqué de visibilité, nous ne sommes pas convaincus que ceux-là même qui voyaient dans nos critiques une posture aient vraiment voulu nous entendre ou nous écouter. Pour une simple et bonne raison, c’est que notre journal La Lettre dérangeait ou les dérangeait. Comme tous les journaux qui ne se coulent pas dans l’approbation d’une « parole officielle » La Lettre perturbait le confort dans lequel beaucoup sont installés et dont par expérience, on sait qu’il est pénible de sortir.
Cette attitude, très naturelle, relève d’un système de défense normal qu’on observe partout parce que les « opposants » et leurs écrits obligent à s’interroger, à réfléchir, à juger, se positionner et en bout de chaine parfois à prendre parti. Donc à s’impliquer ou s’engager : ce que souvent on n’a guère envie de faire pour de nombreuses raisons qui vont de notre paresse « naturelle », au refus de s’engager et de perdre ainsi une tranquillité qui nous permet de vivre en bon voisinage, dans un climat que l’on souhaite le plus paisible possible.
Reste que nos nombreuses oppositions auraient dû, si les choses avaient suivi normalement leur cours, dessiner les contours d’un projet proposé aux Portiragnais aux élections municipales de 2020.
Surtout que notre expérience de six ans, notre apprentissage d’élus et notre connaissance des dossiers se seraient révélés essentiels dans la co-construction de ce projet avec les Portiragnais comme nous l’aurions souhaité.
Pause musicale : hommage à Graeme Allwright
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B) D’entrée de jeu, Mme Chaudoir et son équipe ont fait le choix délibéré de ne pas travailler avec les élus des listes minoritaires. Cela a été clair dès le départ, même si nous aurions aimé avoir une autre attitude en face de nous.
Le rejet de tout dialogue a été une position constante pendant tout le mandat. Il était hors de question de laisser le débat s’ouvrir. Nous l’analysons d’abord comme une fragilité, une crainte de la contradiction et du débat car le projet de la majorité n’était pas porté par de solides orientations et un fil conducteur clairement identifiable.
A noytre avis, c’est en partie la fragilité et la peur de voir leur programme remis en cause et de devoir partager leur pouvoir qui les a conduits à verrouiller leur action et à mettre hors-jeu les deux listes minoritaires
A partir de là , nous n’avions guère de choix où nous nous mettions en mode « revendicateur et critique » ou en mode « soumission à la situation ». Nous n’avons jamais accepté cette « soumission » parce qu’il nous semblait juste de revendiquer le droit que le législateur nous a accordé d’une part et qu’il n’était pas question de se mettre en « veilleuse » pendant six ans et attendre les échéances électorales suivantes. Ainsi, rapidement les deux camps se sont arc-boutés sur leurs positions.
Ce qui s’est révélé au cours de ce mandat à travers la relation entre la majorité et les listes minoritaires correspond à ce que nous appelons une vision «centralisée et verticale» de la démocratie.
Pour Mme le Maire et sa majorité la conduite des affaires se base sur le vieux schéma, dépassé, d’une démocratie représentative où le gagnant des élections a carte blanche et n’a de comptes à rendre à personne et ne sera jugé que sur «son bilan » aux élections suivantes.
Cette idée n’a pas intégré les besoins « d’une démocratisation de la gouvernance et du pouvoir » et c’est pourquoi malgré leur engagement dans leur programme de 2014, il n’y eut jamais de concertation réelle avec la population sur les sujets cruciaux pour la commune.
Les seuls appels à la participation des Portiragnais ont été lancés alors que les décisions étaient déjà prises. Nous ne savons pas ce que les Portiragnais pensent de cette tromperie, mais ce dont sommes certains c’est que ces promesses déçues de participation produisent des effets délétères pour la démocratie, comme le renforcement des malentendus entre professionnels et élus d’un côté, population de l’autre. Les effets positifs escomptés de la participation ne sont du coup pas au rendez-vous.
En fait c’est comme si les « citoyens portiragnais » inspiraient de la méfiance à l’équipe de Mme Chaudoir et qu’il fallait donc toujours décider sans eux et surtout sans les intégrer au processus de décision. Pour compenser ou masquer cette méfiance, la majorité a joué sur deux tableaux pendant le mandat : la communication à tout va et l’opacité des décisions prises entre élus et les bureaux d’études.
En ce qui concerne la communication, elle a été et est encore axée sur trois éléments la séduction, les images et l’air du temps.
Peu importe ce qu’ont fait, il faut des images, que ça ait de la gueule et fasse moderne. Ce que nous qualifions de « fausse modernité » a comme modèle la communication des entreprises et surtout de la publicité, conçue autour de l’idée de séduction. Peu d’informations, mais des images valorisantes où l’action municipale est mise en scène comme un produit de consommation le plus « in » possible.
Cette conception de l’information, devenue un pur produit de communication empêche bien entendu les processus d’émancipation de se développer, du fait d’une conception étroite de la citoyenneté, puisque ne fournissant peu d’informations, elle empêche la population de s’approprier les enjeux, les processus de décisions et les démarches mises en œuvre. En somme, elle ampute l’information de toute valeur émancipatrice.
Dans le même esprit, la prise de décision se fait dans une souveraine opacité entre élus, experts ou autres bureaux d’études, sans qu’on sache sur quelles analyses et avec quels objectifs ont été prises les décisions.
Avons-nous eu des informations sur les tractations concernant l’avenant signé avec GGL sur la ZAC ?
Avons-nous eu des informations concernant le choix et le deal avec l’agglomération sur le choix et le financement du dédoublement de l’approvisionnement en eau ?
Avons-nous eu des informations sur les vbases de négociation du périmètre des abords de l’église excluant le domaine de St Victor et la cave Teyssier ?
Avons-nous eu des informations sur les raisons pour lesquelles la municipalité n'a pas joué de son droit de préemption sur le domaine de St Victor où s'est construit un lotissement ?
Avons-nous eu des informations suivies sur les réflexions menées à l’agglomération sur la protection du lido et de la plage ?
Avons-nous eu des informations sur les choix faits de réfection des voies de circulation à Portiragnes-Plage ?
Nous pourrions continuer encore longtemps ainsi, car on ne retrouve guère de dates de concertation et d’écrits de la municipalité sur toutes ces questions.
Cette opacité est aussi remarquable que significative. Si on vient croire qu’au début, elle provenait d’une crainte et d’une fragilité, elle s’est au fil du mandat mué en système de gouvernance.
La municipalité a fait appel très régulièrement à des bureaux d’études qui sont devenus des "pilotes invisibles" avec les techniciens de l'agglomération de l’action publique municipale. Normal, si on songe aujourd’hui à la complexité technique qu’elle requière.
Ce mouvement qui éloigne de plus en plus les citoyens des prises de décisions nécessite un rééquilibrage, un mouvement parallèle organisant vraiment la codécision avec les habitants, en les associant à la définition des orientations stratégiques. Ceci est d’autant plus vrai que notre commune perd comme les autres beaucoup de ses pouvoirs et de ses compétences au profit de la Communauté d’Agglomération Hérault Méditerranée. Le pilotage se fait ainsi de plus en plus via l’agglomération et les bureaux d’études, excluant les compétences des citoyens.
Ce mouvement est en train de s’accélérer. Il conduit à assimiler le citoyen à un consommateur qui par le bulletin de vote achète tel ou tel candidat. Et il est plus qu’urgent de le contrecarrer en proposant d’autres formes de gouvernance qui réclament de la part des élus davantage de transparence et une approche de l’action publique basée sur la co-construction. Le pragmatisme que l’on nous ressert trop souvent jusqu’ici à Portiragnes est un obstacle à ce changement de cap car il ne s’intéresse guère à la prévision à moyen et long terme. La co-construction va avec l’anticipation.
Prenons encore l’exemple de la ZAC. Nous choisissons celui-ci parce que c’est un projet qui court sur un temps assez long. Nous aurions pu en prendre d’autres mais la question de la ZAC est un excellent exemple. Dans un temps prochain, sur une dizaine d’années, les logements de la ZAC doivent accroitre la population de Portiragnes d’environ 1 000 habitants qui auront à se nourrir, à circuler, et dont les enfants iront à l’école, à la bibliothèque, feront de la musique et utiliseront un grand nombre des services publics communaux ou non comme leurs parents.
Ne prenons ici que la problématique de la circulation : ne faut-il pas dès aujourd’hui se saisir de cette question et anticiper ce qu’on voudrait qu’elle soit dans dix ans avec l’impératif de prendre en compte la diminution de l’empreinte carbone : via les pistes cyclables et déplacements doux ; vélo-bus ; circulation vers les écoles, qui si on a bien compris ne devraient bouger ; circulation sur la RD 37 (avec le département) pour sécuriser les piétons et les cyclistes du village jusqu’à la plage. C’est dans le temps long que la co-construction prend son sens et participe à la bonne santé de la démocratie.
Rien que sur ce sujet il y a du pain sur la planche comme pour les autres domaines que sont le dynamisme du centre, de la station, des services publics et bien entendu de la transition écologique qu’on ne peut plus traiter comme un domaine spécifique, mais doit être le pivot de chacune des réalisations et des projets.
Ce qui a été loin d’être le cas au cours de ce mandat, puisque rien que sur les aménagements réalisés sur le mandat, du choix énergétique pour la mairie en passant par son esplanade bétonnée, jusqu’à la réfection des bâtiments publics et des voieries, cette question est passée au second, voire au dernier plan et ce parce que la majorité a manqué d’ambition, d’anticipation voire même de courage.
Un second obstacle à la co-construction et à la participation citoyenne est ce que nous avons vécu au cours de ce mandat et qui relève du « calendrier électoral ». Le problème est double :
- Avoir promis beaucoup de choses
- Avoir dans le viseur sa réélection
Quand on a promis beaucoup de réalisations, peu de place est laissée à la concertation et à la réflexion. Il faut aller vite (toujours trop), et en faire le plus possible sans que cela s’inscrive dans un plan d’ensemble puisqu’il n’a jamais été conçu.
L’exemple le plus frappant est la réalisation de la mairie, que Mme le Maire, très logiquement voulait voir fini suffisamment tôt pour qu’elle s’inscrive dans son bilan.
Le deuxième effet correspond à ce que nous avons observé pendant ces six ans et que nous qualifions de précipitation. C’est le cas pour la rénovation du cœur de ville, où le calendrier était trop serré parce qu’il fallait que suivent les travaux de la mairie. Dans ces agendas resserrés où l’on a les yeux braqués sur sa réélection, il n’y a jamais de place pour la co-construction et la démocratie participative.
Un autre effet est celui que nous qualifions « d’effet de visibilité » : dans le même esprit, quand on a dans le viseur sa réélection, on a tendance à privilégier ce qui va avoir un caractère de haute visibilité et on va plutôt mettre de côté ou de passer à l’as ce qui a un caractère moins voyant comme par exemple la politique sociale ou en direction de la jeunesse.
L’ennui c’est que cette approche que l’on retrouve dans beaucoup de communes a pour conséquence finale d’assimiler l’intérêt général à l’intérêt politicien.
Pour conclure sur le sujet, notre approche de l’action publique s’est différenciée de celle de la majorité municipale autour de la distinction entre projet et catalogue d’actions ou de promesses.
Pour nous le projet se définit via la détermination d’orientations stratégiques déclinées autour des besoins recensés avec la population et d’objectifs à hiérarchiser et à décliner autour des outils et des moyens nécessaires à leur réalisation. C’est autour de cette opposition que réside notre différence de conception de l’action publique. Moins séduisante, certes, moins clinquante, l’idée de projet est pourtant la seule capable d’éviter une conduite des affaires municipales au coup par coup et de permettre une co-construction à même d’intégrer une participation citoyenne intelligente et la transition écologique.
Pause musicale : fantaisie de Fantazio
https://www.youtube.com/watch?v=exdH4zgSIJ8
C) Cette dernière partie est une analyse personnelle qui n’engage que son auteur.
Maintenant il est temps de se recentrer sur la liste Mieux Vivre à Portiragnes et d’essayer d’analyser ce que sont devenus son projet de 2014 et la liste elle-même. Il est évident que nous n’avons pas réussi sur la durée de ce mandat a créé une dynamique autour de notre liste et notre projet et sans doute même pas à conserver l’élan qui avait été le nôtre en 2014.
Pour ce faire, il nous faut nous replonger dans le temps et revenir aux élections de 2014 qui avaient déjà conduit à une scission due à une différence de stratégie pour aborder les élections.
Scission qui nous valut d’avoir deux listes conduites par des membres de Cap A Gauche au premier tour et aura logiquement contribué à nuire à la dynamique envisageable si les résultats s’étaient situés entre 25% et 30% des votants. Il ne s’agit ici ni de condamner, mais de constater les effets de cette scission
En 2014, ce conflit interne ne fut pas non plus favorable à l’élaboration de notre projet et à la constitution de notre liste.
Au sortir des élections de 2014, un grand nombre de colistiers de Mieux Vivre à Portiragnes ont fait le choix d’intégrer l’association parce que nous n’avions pas les forces suffisantes pour mener de front le travail d’une liste et l’animation d’une association. Nous pensions alors que nous y gagnerions parce que cela dynamiserait l’association Cap A Gauche en lui apportant du sang neuf et permettrait à la liste Mieux Vivre à Portiragnes de fournir un cadre de réflexion pour un futur éventuel projet.
Si cette intégration et cette combinaison nous simplifièrent la vie et l’organisation, elles eurent par contre beaucoup d’effets négatifs ou contre-productifs. La première conséquence, fort logique, fut d’étiqueter la liste Mieux Vivre à Portiragnes à l’extrême gauche, même si en 2014, beaucoup des colistiers de notre liste de sensibilité de gauche n’avaient aucune carte et n’étaient pas des militants. La liste s’était rassemblée sur des valeurs et la construction d’un projet et non sur des appartenances politiques.
D’autres difficultés ont rapidement surgi de la réunion des deux entités, celles consistant à mener de front : les volets municipal et politique sans que nous en ayons au préalable priorisé l’un par rapport à l’autre. En est témoin, le journal la Lettre qui proposait des articles sur ces deux contenus. Cette confusion fut aussi entretenue par ma double casquette de président de l’association et d’élu au conseil.
Ainsi cette combinaison n’a pas permis d’assigner des objectifs clairs à la Liste Mieux Vivre à Portiragnes et de mettre en place les outils et les moyens de nous projeter sur 2020.
Il est vrai que nous découvrions notre mandat d’élu de l’opposition ainsi que le travail qu’il représentait et les obstacles qu’on dresserait sciemment devant nous pour nous compliquer la vie.
Autre phénomène que nous avions insuffisamment pris en compte, au sortir des élections de 2014 et de sa fièvre, c’est le lent travail d’usure du temps et le désinvestissement auquel il mène.
Si nous avions convenu de travailler et de préparer collectivement (collectif ni restrictif, ni exclusif) les conseils municipaux, au fil du temps, nous ne nous sommes retrouvés plus qu’à quelques-uns pour échanger et préparer les conseils bien qu’un groupe se soit constitué autour de la rédaction du journal la Lettre où s’étudiait et se réfléchissait l’action municipale.
Pour autant, même ce groupe n’a été en mesure ni d’initier une nouvelle dynamique, ni d’agréger de nouvelles forces autour de notre projet qui se révélait peut-être déjà insuffisamment porteur, parce que manquant de lisibilité aux yeux des Portiragnais.
Si nous y sommes pour beaucoup dans cet échec parce que nos choix n’ont pas toujours été pertinents, sous-estimant les conséquences de certains d’entre eux, et parce qu’au final nous n’avons pas réussi à susciter l’envie de nous rejoindre, nous n’avons pas été aidés par des circonstances défavorables, les changements sociétaux et l’évolution démographique de Portiragnes :
- La population de Portiragnes a beaucoup changé depuis une trentaine d’années et le village est devenu une petite ville politiquement de droite (voir les résultats des élections et la composition de la liste de Mme Chaudoir). La population de Portiragnes, s’assimilant de plus en plus à celle d’une ville dortoir, vieillissante, est largement tournée sur des désirs de consommation de biens, de services et de loisirs.
Les prix des logements et des terrains ajoutés à un manque de logements sociaux ne favorisent pas la mixité sociale. La tradition de gauche qui existait à Portiragnes, née du temps où celle-ci était un village viticole où les ouvriers agricoles étaient nombreux et travaillant sur place avaient les mêmes intérêts, a disparu au fur et à mesure de la transformation de la population.
Les gens de l’extérieur ayant les moyens de s’installer à Portiragnes, que ce soit dans les lotissements ou comme plus récemment dans le village, l’ont choisi en raison de différents critères et parmi ceux-ci, le cadre de vie avec la mer, le canal…, ainsi que des services très nombreux proposés par la municipalité. La valorisation du cadre de vie, la station comme les services et équipements municipaux ont été portés par les municipalités de gauche successives dont c’était le souci et la volonté.
Ainsi par un curieux renversement, ce que les municipalités de gauche ont créé a installé une classe moyenne dont les intérêts et les valeurs ne sont plus en adéquation avec celles dont nous sommes porteurs.
En caricaturant quelque peu le nouveau rapport que la population portiragnaise entretient avec son environnement et le politique, on pourrait avancer qu’il se base davantage sur une recherche de satisfaction et d’amélioration des besoins particuliers (ou d’un groupe social) que dans une perspective de changement et de transformation, surtout s’il y a risque de bouleversement des statuts et des situations.
- D’autre part, encore plus ici qu’ailleurs, on est confronté à la résistance que montrent beaucoup à s’engager « politiquement » aujourd’hui où les formes d’investissement sont devenus protéiformes ou parce qu’ils ne veulent pas sortir d’une zone de confort auquel chacun aspire ; ou encore parce que les perspectives de transformation ont du mal à se concrétiser dans un mouvement collectif et enfin parce que beaucoup préfèrent s’engager dans des actions concrètes, immédiates, qu’ils jugent plus efficientes et parce qu’elles ont pour elles de ne pas se placer dans une volonté de conquête du pouvoir institutionnel.
- Enfin les contraintes et le niveau d’investissement rendus nécessaires en raison de la complexité du travail des élus sont devenus des freins réels à l’engagement dans un projet, surtout quand celui-ci se base sur la délégation, la participation et la co-construction. Freins d’autant plus fort que l’engagement dans une opposition, celle qui porte un regard critique sur l’action municipale n’est guère valorisant et valorisé quand il n’est pas stigmatisé.
Tous ces éléments comme encore d’autres qu’ils seraient longs d’analyser et de détailler ont participé à une usure et plus encore à une perte de sens de notre action pour changer le regard et la vision des Portiragnais sur l’action municipale et ont déstabilisé petit à petit et sans qu’on le conscientise vraiment, nos volontés personnelles et respectives malgré une dernière tentative de relancer la machine…
La suite pour très bientôt
Prochain et dernier volet
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